Un arbre en Lozère ... et ailleurs

Semaine 23 : Le Roc Saint-Gervais

Le 05/06/2022 0

Dans La Lozère

Le Roc Saint-Gervais, sa chapelle et son cimetière, sont situés sur l hameau des Douzes, dans les Gorges du Tarn. Les Douzes, pour moi, c'est d'abord et avant tout le fameux restaurant tenu par la famille Vergely, où nous avons passé d'excellents moments, en famille ou avec des amis. Je vais vous parler ici du site de Saint-Gervais, au travers de son histoire, d'une fort belle promenade, mais aussi d'anecdotes ...

Son histoire

La chapelle Saint Gervais est dédiée aux frères jumeaux Gervais et Protais, martyrisés à Milan en l'an 57, sous le règne de Néron. Saints et martyrs, ils sont invoqués contre le rachitisme des enfants, la cécité et pour la prospérité des troupeaux. Les éleveurs des causses ont su maintenir un pèlerinage des bergers, chaque premier dimanche de juillet, qui se termine par la bénédiction des branches de buis cueillies le long du chemin qui mène au roc. Une fois reliés entre eux, ces rameaux sont destinés à être placés dans des bergeries, afin de préserver le bétail de la maladie et de garantir la protection des bâtiments contre la foudre et l'incendie.

Gervais et Proctais

De nombreux habitants des Douzes reposent dans le cimetière et étaient portés à bras sur le sentier escarpé avant d'être inhumés près de la chapelle.

Il est probable que le Roc Saint Gervais ait abrité une petite communauté comme l'indiquent les aménagements dans les rochers (restes de murs, roches taillées, etc.). De même, une citerne située près de la chapelle rappelle les techniques de récupération des eaux de pluie pratiquées par les habitants de ce nid d'aigle. Rassemblés autour de la chapelle et rassurés par la situation dominante du roc, on sait qu'en 1208 les habitants étaient sous la protection d'un seigneur local : Jehan des Douzes, sire de Saint Gervais. Mais au XIVe siècle, les moulins situés près de la rivière sont plus fréquemment cités dans les actes et indiquent un déplacement probable de la population du roc Saint Gervais vers la vallée de la Jonte, dans l'actuel hameau des Douzes.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA 3.0. Source : Article Roc Saint Gervais de Wikipédia en français (auteurs)

Une ballade, le sentier du Roc Saint Gervais

Cette bonne marche de 11,5 km part de Hyelzas. On peut retrouver la fiche randonnée en cliquant ici. Il est préférable de la faire le matin à la fraiche, car si la descente vers les Douzes est rapide et agréable et peut se conclure par un bon café à l'Auberge de la Jonte, la remontée fait transpirer ! Un premier arrêt pour visiter le site du Roc Saint-Gervais s'impose. Le site est grandiose et impressionnant avec une vue magnifique sur les Gorges de la Jonte. Le petit cimetière jouxtant la chapelle donne une impression de sérénité, certaines tombes sont encore entretenues. Quoique fort différent, cela vaut largement la Plage de la Corniche où voulait être enterré Brassens !

Et lorsque, en sueur et affamés, on arrive enfin à Hyelzas, la fromagerie le Fédou offre un large choix de ravitaillement pour se réconforter. 

Arrivée à Hyelzas par Emmanuelle Déchamps
Le Roc Saint-Gervais par Emmanuelle Déchamps

Deux "habitants" du cimetière, Louis Truel et sa femme Marie

Sur le montage photos ci-dessus, l'on devine une plaque en forme de cœur (photo agrandie ci-contre). Il s'agit de la tombe de Louis Basile Truel (1855-1930) et de sa femme Marie-Christine Victoire Julié (1867-1916). La famille habitait dans le village des Horts, entre Hyelzas et les Hérans. Ils s'étaient mariés à la Malène en 1887, Marie étant originaire de Rieisse. Ils ont eu 11 enfants. Deux de leurs garçons sont décédés lors de la Grande Guerre et figurent sur le Monument aux Morts de la Parade.

Famille Truel des Horts

 

Pour terminer, une histoire racontant la difficile ascension du Roc Saint-Gervais à l'occasion des enterrements, par le regretté Roger Lagrave.

Le chemin où les morts tuent les vivants ...

Ce jour-là, c'est le Cyprien, de la Caze, qu'il fallait emmener là-haut, dans sa boite de chêne.
Cyprien faisait bon poids : deux quintaux d'os et de sang. Ajoutez-y le bois, il nous fallait quatre gaillards pour mener l'affaire à bien jusqu'en haut de la roche.
Dans la parentèle, on choisit les quatre hommes les plus larges ; de ceux qui, les après-midi du dimanche, soulèvent des essieux de char devant les amis ébahis ; de ceux qui, au moulin ou à la batteuse, déchargent et transportent des sacs de grains de plus de cinquante kilos comme ballots de laine.
Par les quatre coins de la boite, ils soulèvent le Cyprien ; et la procession démarra au signal de la clochette qu'agitait comme un diable en robe rouge l'enfant de chœur.

Premier lacet. Ça pèse, on commence à suer sous le chapeau mais on y va.

Deuxième lacet. Les pierres du chemin roulent et l'on risque de se casser une cheville si l'on n'y fait attention ; les poignées du cercueil entrent dans la paume des mains mais on ne lâchera pas. Les quatre hommes deviennent tout rouge et leur pantalon se trouve étroit à la ceinture.

Troisième lacet. L'un des porteurs souffle comme un bœuf. Irons-nous jusqu'au bout ? C'est ce que se demandent les trois autres.

Quatrième lacet. Le porteur défaillant lâche ; les trois autres ne peuvent retenir et le cercueil abandonné à son poids et à la pente entreprend de dévaler l'abrupt. Horrifiée, la foule le voit bondir sur le chemin comme pris de folie. Les rochers rencontrés dans la course se renvoient la caisse de l'un à l'autre avec des claquements que les falaises de la gorge répercutent et amplifient, une musique pour danse macabre.
Dans la foule horrifiée, c'est le tumulte, la bousculade vers le bas pour fuir la pente. Dans sa course infernale, le cercueil vient de faucher deux pauvres femmes, que le choc violent entraine vers le bas, vers l'issue fatale que personne ne peut empêcher.

(Roger Lagrave)

L'intégralité de l'histoire est à retrouver dans le livre "La Lozère racontée II" par Roger Lagrave, aux éditions Gévaudan Cévennes.

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