Estienne Boniol, seigneur de Bieisse, bachellier ez droictz, lieutenant de juge royal en la Court commune de la ville de Yspaignac, en Gevaudan.
A tous ceulx quy ses presantes verront, salut. Scavoir faisons que ce jourd'huy, datte des presantes, pardevant nous, tenans l'audiance de ladicte Court audit Yspaignac, se seroient présantes vénérables personnes M° Jehan Testent, doien, et Jehan Daudé, chanoine et procureur du Chappitre et esglise collégialle Nostre-Dame de Quésac Lesquelz, tant en leur nom que des aultres chanoines dudict Chappitre, auroint expausé et remontré avoir besoing fere sommaire apprinze et veriffication, pour la conservation de leurs droictz cn plusieurs et divers lieux et négoces de ce que Ieur esglise et maison collégialle, en lan mil cinq cens soixante deux, feust envahie et surprinze par ceulx de la prethandue religion réformée, et, dicelle esglize toute les reliquères et ornemens servans au divin service, de grande valleur, et aussi les cloches et les meubles du comun et particullier, des doien, sacrestain et chanoines, princippallement les papiers, tiltres et docurnans de leur archifz feurent prins et empourtés; le couvert de leur dicte esglise breullé, comme aussi la maison de l'hospital dudict lieu avec neuf lietz garnis de coytres, couvertes et linceulx Et despuis, en lan mil cinq cens soixante sept, leur dicte maison collégialle feust brullée du commandement du seigneur de Thoras ensamble le couvert de l'esglise, que lesdictz doyen et chanoines avoint faict recouvrer.
Et encores en lan mil cinq cens huictante leur dicte maison collégialle feust batue du canon, conduict par le cappitaine Merle, et par ce moyen forcée et prinze ; deux desdictz chanoines tués et plusieurs aultres faictz prisonniers et rançonnés ; ung prebtre du village et ung leur parroissien aussi tués, et tout ce qu'ilz avoint peu de rechief acquérir et remectre dans leur dicte maison collégialle et esglise des meubles pour eulx et ornemens pour ladicte esglise ; de rechief, le tout feust pillé et empourte, ensemble tout le reveneu et meubles des habitans dudict Quésac, se que despuis la susdicte premiere prinze de leurdicte maison et esglise et commancement de troubles lhors surveneus et despuis continués au present royaume, comme est notoire, lesdictz doyen et chanoines n'auroint peu jouir, la plus part du temps de leurs dismes, rantes et reveneus que auroint esté prins el levés par eulx de contrere party, tenant garnison en leur dicte maison et occupans les beneffices dépendans dicelle, situés au païs de Cevènes, quest à leur hobéissance et dévotion et de fort difficile accès, mesmes le beyneffice de St Fleur du Pontpidor et St Estienne du Valdonnés, ausquelz consistent leur principal bien ; le tout aiant esté prins ct levé longtempz par ledict cappitaine Merle, mesmes par délibération publique et authorizée par feu Monseigneur frère du Roy, pour sortir ledict Merle et luy fere quicter la ville de Mende, leur dicte maison feut baillée pour retrete sans en avoir faict aulcune recompance ausdictz chanoines; lesquelz, à ceste occasion auroint esle constrains vaguer et recourir aux empruntz, pour santretenir, sur leurs amis, ung fort longtemps, se estans tellemant et cy davant endebtes sans avoir faict que bien peu de réparation à leurdicte esglise et maison, qui sont encores la plus part descouverlz, quilz nont à présent moyen de satisfera à paier beaucoup d'aultrcs debtes qu'ilz ont faict aussi pour le paie nent des décimes et pour la garde et conservation de leur dicte maison à l'hobeissance du Roy, oultre plusieurs rantes et reveneus qu'ilz ont esté constraîns vandre et alliéner; tellement que par les moiens susdictz que des grandes courses et passaiges de gens de guerre pandant les susdictz sièges et despuis durant les troubles qui ne sont encores estains en cedict païs, lesdictz chanoines non seullement mais la pluspart des habitans dudict lieu el parroisse de Quezac, chargés dallieurs de grandz tailles et sucides extraordinères, joinct l'infertillité des terres et estérillité des fruictz quont regne ces dernières années, et ce présentent ceste cy plus grandz, à cause que la plus part des povres paisans ne recuellent pas seullement la semance qu'ilz avoint impozé aux terres, sont extrémement travaillés et ruynés, ainsin quest tout notoire et esvidant; requérans sur la vérité de ce dessus les assistans et illec presens, estant des principaulx habitans, tant dudict lieu el parroisse de Quésac qne de la present ville d'Ispagnac, leur voisins prochains, ne distans que demy quart de lieue, estre ouys et examinés et de leur dire et deppausalion leur estre faict et expédié acte, pour leur servir comme de droict et raison.
Nous dictz lieutenant, aians entandu la susdite exposition aurions interrogés, sur le conteneu d'icelle, Me Guilhaumes Robert, baille de la Roche, et aagé comme il a dict de soixante ans ; Pierre Mathieu, baille de Quézac, aagé de cinquante ans; Estène Olivier, de Quézac, aaigé de soixante ans ; Pierre Yssarte, dudict Quézac, de quarante ans; Me Jehan de Broa, chirurgien, aigé de soixante quatre ans; Claude Lagarde, habitant d'Ispagnac, aagé de septante ans ; Michel Menade, d'Ispagnac, aage de soixante ; Anthoine Corsier, dudict Yspagnac, aagé de soixante cinq ; Anthoine Albaric, de Montbrun, aagé de cinquante ou environ.
Toutz lesquelz aiant au préalable faict et presté serment de dire vérité selon Dieu Vivant, levans la maing au Siel, ont dict et dépausé l'exposition desditz sieur doyen et chanoines, estre tres certaines et notoires et véritables, cest assavoir que la maison collégiale dudict Quézac a esté prinze, reprinze, brullée, forcée, batue de canon par ledict cappitaine Merle, l'esglise Notre Dame dudict Quézac bruslée et est encores descouverte la plus part et en povre estat, toutz les joyaux et ornemans d'icelle, ensamble les meubles, papiers et dôcumans de ladite maison collégiale de Quézac, prinz, ravis et pillés plusieurs et ritérées fois par ceulx de contrère party, et non seullement ceulx desdits doyen et chanoines, mais beaucoup de biens meubles que les habitans dudict Quézac et de la parroisse avoient mis pour relrcle dans ladicte maison collégialle, beaucoup de maisons desdictz habitans aussi ruinés et la plus grand parl d'icelles bruslées et abatues, tant par le feu que aultres courses ot ravaiges dung party et d'aultre, les rentes et revenus de ladicte maison collégule, tant de Quézac que St Estienne du Valdonnès, St Fleur du Ponpidour, scitué au païs de Cevenes estant ile contrère party, que aultres en deppandans, prinz et occupés la plus part du temps despuis lesditz troubles, tant par ledict cappitaine Merle que aultres. Ensorte que lesdits chanoines ont demeuré longtemps despolliés de leur dicte maison et privés de leurs dictes rantes et revenans, aians ils esté constrains se retirer pour vivre, ce que ne peult avoir esté sans avoir enprunté leurs amis, estant voix et femme publique quils sont beaucoup endeptés, encores qu'ilz aient vendu plusieurs de leurs biens el rantes, estant grand domaige, voire grand mespris et casi escandalle aux catholiques de voir ladicte esglise de Quézac ruinée et descouverte, comme elle est de long temps renommée ; disans en oultre que lesditz chanoines sont tellement povres à cause de ce dessus et que pour la perte de leurs tiltres ilz ne peuvent à présent lever leurs rantes, que a seste occasion leur sont deues et mises en procès ct quc d'ailleurs aussi pour la povreté de leurs parroissiens, ravaigés et ruines que dessus, et encores a present surchargés de grande charges extraordineres et par la grand infertilité et sterilité des dernieres années et dont la presente se monstre encore plus pire et mesmes que tant pour raison desdictes gueres et contagion plusieurs personnes sont morts et aussi de peste que a eu courtz en ce païs de tempz de l'année y veneus pour batre Maruéjolz et Peire; et les terres sont demeurées incultes et maisons inhabitées; iceulx chanoines nen peuvent tirer aulcung secours que il leur est impossible de satisfere et paier de longtemps se qu'ilz doibvent, veoire sans vandre, à ces fins, l'avantage de leurs biens. Et ce dessus les dictz tesmoingz, toutz ensamble el unifformement, ont dict, confirmé et certiffié estre chose véritable et le scavoir pour avoir veu la pluspart desdictes chozes, comme habitans là, estans lhors des temps susdictz audict Quésac, les aulcungz et les aultres comme leurs prochains voisins et pour estre chozes très notoires et magniffestes. Dequoy aurions octroié acte ausdictz exposans comme de raison.
Donné à Ispagnac, le lundy quatriesme jour du mois de septanbre l'an mil V quatre vingtz quinze.
Bonyol, lieutenant
Moy notaire royal soubzsigné pour le greffier scripvant sous ledit sieur lieutenant.
Leblanc notaire