Un arbre en Lozère ... et ailleurs

O comme Ouallet

Le 17/11/2023 0

Dans Les Normands

Le lettre O nous amène à nouveau en Normandie où vivait le sosa 210 de mon époux, un certain Victor Pierre Vérité Ouallet. L'histoire se passe dans le Pays de Bray, à la frontière entre les départements de la Seine-Maritime et de l'Oise.

Tout d'abord, le résumé de la vie de Victor

Victor ouallet

Ses parents, Pierre OUALLET et Marie-Françoise PERIER vivaient dans le village de Haussez, le père était charpentier. Victor Pierre Vérité y est né le 16 avril 1795. On se demande qui lui a donné son original troisième prénom ! 

Il vit à Haussez jusqu'à son premier mariage en 1818, il est charpentier comme son père. Sa première épouse, Marie-Geneviève Aimée Thiessé est originaire du Thil-Riberpré. Elle est morte en couches deux ans plus tard après lui avoir donné deux filles : Marie-Rose Aimée en 1818 et Marie-Joséphine en 1820.

Victor se remarie en 1822 à Grumesnil avec Marie-Françoise Jubille Bourguignon du village de Haudricourt. Deux enfants naissent de ce mariage : Hildevert Désiré en 1823 et Marie-Rose Esther en 1825. A partir de ce mariage, la profession de Victor change, sur les actes de naissance de ses enfants, il est déclaré tisserand. Ils vivent toujours à Haussez. La seconde épouse de Victor décède en 1827.

Le troisième mariage de Victor est célébré le 23 avril 1829 à Haussez. Marie-Anne Sophie Sanse est l'ancêtre de mon mari. Le couple a eu trois enfants : Pierre Eugène en 1829, Marie-Catherine en 1831 et Céleste Euphrasie (sosa 105) en 1833. Au gré des recensements, Victor est déclaré soit tisserand, soit charpentier et habite différents villages des alentours de Haussez : Grumesnil, Canny sur Therain.

Il décède dans ce dernier lieu le 16 juin 1862 à l'âge de 67 ans.

 

Maintenant l'affaire qui nous intéresse

le feu par Emmanuelle Déchamps

En début d'année 1844, trois incendies frappent la commune de Grumesnil.

  • Le 15 février, chez M. Grasoignon, le maire de la commune.
  • Le 6 mars, chez le sieur Mabillote, maréchal-ferrant du village.
  • Et le 12 mars, chez le sieur Bobée, le cafetier.

Tous ces incendies, déclenchés en début de soirée ou dans la première partie de la nuit, sont reconnus comme criminels et ressemblent à des actes de vengeance.

Mais vengeance pour quelle raison ?

Le 9 février précédent, les dénommés Joseph Arger et Amédée Decaux comparaissaient devant la Cour d'Assises pour le meurtre d'une vieille femme ainsi que pour avoir fait disparaitre son corps en incendiant sa maison. Arger fut condamné à mort et Decaux aux travaux forcés à perpétuité.

Decaux ayant vécu quelques temps dans la commune de Grumesnil, le maire Grasoignon ainsi que d'autres administrés, furent convoqués pour éclairer la justice sur les antécédents de ce monsieur. Ce qu'ils ont du dire n'a pas du être favorable ...

La voilà la raison !

 

Que viennent faire mes Ouallet dans l'affaire ?

Rapidement après le premier incendie, certains suspects sont arrêtés, dont un certain Henry Alexandre.
Et le 25 mars ... c'est au tour de Victor et de sa femme.

Arrestation ouallet

Mais pourquoi donc ?

Henry Alexandre, de son vrai nom Pierre Aimable Fleurus Alexandre, bucheron de son état, était le mari de Marie-Rose Aimée Ouallet, qu'il avait épousé à Grumesnil le 30 novembre 1843. Était-il l'ami d'un ou des deux condamnés ? Peut-être bien. 
Rapidement, sa femme est arrêtée, et donc par ricochet, ses parents également.

Et la suite ?

Les parents Ouallet sont rapidement disculpés mais leur fille et sont mari sont condamnés aux travaux forcés, elle à vingt ans et lui à perpétuité. 
Marie-Rose a du bénéficier d'une remise de peine puisqu'on trouve ensuite trace de son remariage le 23 novembre 1861 à Beaubec la Rosière avec Charles François Fortuné Lesage.
Son premier mari, quant à lui, ne purgera pas la totalité de sa peine : il est mort au bagne de Brest le 13 nevembre 1850.

Alexandre deces

 

Le 9 février 1844, les nommés Joseph Arger et Amédée Decaux comparaissaient devant la Cour d’Assises de la Seine Inférieure.
Arger était accusé d’avoir, le 9 novembre précédent, au milieu de circonstances horribles, assassiné une femme plus que septuagénaire, nommée la veuve Decaux, qui habitait la commune de Thil-Riberpré ; d’avoir commis en outre un vol à son préjudice, et d’avoir cherché à faire disparaitre les traces de ce double crime en allumant un incendie dans les flammes duquel sa victime avait bientôt perdu un reste de vie qu’il n’avait pu lui enlever.
Amédée Decaux se rattachait à Arger par les instructions qu’il lui avait données, soit pour le vol qui était le but, soit pour l’assassinat qui était le moyen, soit enfin pour l’incendie, ressource extrême par laquelle les deux coupables espéraient s’assurer l’impunité.
Les charges nombreuses que l’instruction avait fournies ayant été aggravées encore par les débats contradictoires, les deux accusés furent condamnés, Arger à la peine capitale, Amédée Decaux aux travaux forcés à perpétuité.
Parmi les témoins cités à la requête du ministère public, figurait le sieur Grasoignon, maire de Grusmesnil. ; il était appelé, non pour s’expliquer sur les faits de l’accusation eux-mêmes, dont il n’avait point une connaissance personnelle, mais pour éclairer la justice sur les antécédents de Decaux qui avait résidé dans la commune confiée à son administration. Les renseignements qu’il donna ne furent point favorables à l’accusé. Toutefois, cette déposition ferme, mais en même temps modérée, étrangère d’ailleurs au fond du procès, ne semblait pas de nature à exciter de criminelles représailles contre celui qui l’avait faite. D’un autre côté, on pouvait espérer que la juste répression qui venait de frapper deux grands coupables serait un avertissement salutaire pour une population dont la masse honnête et laborieuse renferme cependant quelques éléments trop bien disposés pour le crime.
Il n’en devait point être ainsi, et le canton de Forges vit bientôt, à trois reprises différentes, se renouveler un crime odieux par sa lâcheté, le plus dangereux peut-être, puisqu’il emploie un moyen d’action contre lequel il est presqu’impossible à l’homme de se défendre, et qu’il s’attaque en même temps à la propriété et à la personne des citoyens.
Le 15 février 1844, le sieur Grasoignon, maire de la commune de Grumesnil, avait quitté son domicile vers une heure de l’après-midi, pour aller diner chez un de ses amis à Villedieu ; il ne devait rentrer que pendant la nuit. A huit heures du soir, la veuve Grasoignon, sa nièce, qui habitait la même exploitation rurale, se retira dans sa chambre ; les domestiques suivirent bientôt son exemple ; un journalier, souvent employé par le sieur Grasoignon, avait quitté la maison à sept heures et demie, après le souper.
Il y avait une heure environ que la dame Grasoignon s'était mise au lit, lorsque, se réveillant tout à coup, elle aperçut par la croisée de sa chambre qui donne sur la cour, une colonne de fumée ; elle se leva aussitôt, et ne tarda pas à reconnaître qu'un incendie avait éclaté dans un bâtiment à usage de grange et de pressoir, dont le grenier renfermait du fourrage. Malgré la promptitude des secours, qui arrivèrent de toutes parts, ce bâtiment fut entièrement consumé sur une longueur de trente-trois mètres ; différents objets qui s'y trouvaient renfermés devinrent la proie des flammes. La perte, tant mobilière qu'immobilière, s'éleva à 4,500 fr. environ.
Il était impossible d'attribuer ce sinistre à l'imprudence, d'abord parce que, chez le sieur Grasoignon, les précautions les plus minutieuses sont prises afin de prévenir les incendies, mais surtout, parce que, pendant la soirée du 15 février, personne n'était entré avec de la lumière dans les lieux où le feu s'était manifesté.
Divers indices, au contraire, signalaient la malveillance comme la cause du malheur qui venait de frapper le sieur Grasoignon. Ainsi, les flammes avaient commencé leurs ravages sur la partie de la cour située en face de l'église, opposée à la cour, de telle sorte que les habitants de la ferme, plongés d'ailleurs dans le sommeil, ne pouvaient apercevoir l'incendie que quand il serait trop tard pour en arrêter les progrès. D'un autre côté, au moment où les flammes s'étaient fait jour par la toiture du pressoir, le bâtiment s'était trouvé embrasé dans son entier, comme si le feu avait été mis en plusieurs endroits à la fois.
Le nommé Henry Alexandre et la veuve Decaux, soupçonnés d'être les auteurs de ce crime, furent bientôt arrêtés.
Cependant, le 6 mars, un nouvel incendie vint encore épouvanter la commune de Grumesnil.
A neuf heures et demie du soir, le sieur Mabillote, maréchal-ferrant, fut réveillé par les cris d'alarme des sieurs Boulanger et Bobée, qui lui annonçaient que le feu dévorait son habitation. A peine sorti de son lit, il reconnut que la partie de la maison qui lui sert de cellier était déjà consumée, et que les flammes avaient gagné la grange et l'étable à vaches. Elles firent de rapides progrès, et lorsqu'on parvint à s'en rendre maître, une moitié du bâtiment était entièrement détruite ; l'autre avait éprouvé des dommages considérables. Une vache et un porc avaient été asphyxiés ; de la paille, du foin, du bois à brûler, du bois de charpente, du blé, des draps et d'autres objets mobiliers étaient consumés. La perte atteignait le chiffre de 3,200 francs environ. 
Ici encore, comme chez le sieur Grasoignon, il était facile de reconnaître la main d'un incendiaire. Le sieur Mabillote et sa femme sont, au dire de ceux qui les connaissent, très soigneux l'un et l'autre, toujours en garde contre le feu, dont la pensée seule leur inspire une grande frayeur. Ils n'étaient point allés avec de la lumière dans l'endroit où l'incendie avait pris naissance. D'ailleurs, une circonstance révélée par les sieurs Boulanger et Bobée ne pouvait laisser aucun doute sur le caractère criminel du sinistre. Ces deux témoins, après s'être aperçus du danger qui menaçait le sieur Mabillote, se dirigèrent vers le pignon de sa maison situé au midi, guidés par la flamme qu'ils voyaient s'échapper de ce côté. Ils s'assurèrent que le rez-de-chaussée ne brûlait point, en regardant dans l'intérieur par des jours à air pratiqués du côté de la rue ; mais le feu s'était manifesté dans un grenier placé à l'étage supérieur, et qui renfermait des bourrées, C'était cet endroit que l'on avait choisi, dans l'espoir bientôt réalisé que l'incendie, activé par les matières combustibles qu'il allait rencontrer, acquerrait promptement une intensité assez grande pour rendre inutiles tous les efforts que l'on voudrait diriger contre lui. 
Les habitants de Grumesnil, justement effrayés, ne savaient cependant quelle direction ils devaient donner aux soupçons ; ils ne fournissaient aucune indication qui put guider les magistrats dans les recherches pénibles auxquelles ils se livraient, lorsque, six jours plus tard, leur commune fut le théâtre d'un troisième incendie qui allait enfin mettre la justice sur la trace des vrais coupables. 
Ce crime, commis à une heure peu avancée de la soirée, et alors que les habitants de la maison incendiée n'étaient pas encore couchés, dénotait chez son auteur une audace extraordinaire. 
Le 12 mars, à huit heures du soir, les sieurs Gosselin et Dufour, commandés pour un service de sûreté, se rendaient chez le capitaine de la garde nationale, dont ils allaient prendre les ordres. En passant devant la barrière du sieur Pierre Bobée, cafetier, ils aperçurent une sorte de clarté sur le faîte de sa maison, s'approchèrent, et virent une poignée de paille qui brûlait, et paraissait avoir été déposée à dessein sur la couverture en tuiles d'une petite étable, située à l'extrémité ouest de l'habitation. Le toit de cette petite étable était dominé par la couverture en paille d'une entrée de cave qui formait une saillie peu considérable. Le feu venait de s'attacher à une partie saillante, au-dessus de laquelle la poignée de paille avait été placée. Les sieurs Dufour et Gosselin s'empressèrent de donner l'alarme et d'avertir le sieur Bobée, assis tranquillement à son foyer, en compagnie de sa femme et de son beau-frère. Mais les flammes, poussées par un vent violent, prirent en quelques instants un développement considérable. Après avoir dévoré la couverture de l'entrée de la cave, elles atteignirent bientôt le bâtiment principal, à usage d'habitation et de salle de billard, dont la toiture, également en paille, fut entièrement détruite. Les contre vents, les croisées furent en partie consumés. Le dommage occasionné par ce sinistre fut évalué à 1,000 fr. environ 
Le 25 mars, on s'assurait de la personne des époux Ouallet. Le 24 du même mois, la femme Alexandre, leur fille et belle-fille, était conduite à la maison d'arrêt de Neufchâtel.
Cette affaire a donné lieu à de longs débats. Après l'audition de nombreux témoins, qui avait pour but d'assigner à chacun des accusés la part qu'il aurait prise aux crimes que nous venons de rappeler, M. Pinel, substitut du procureur-général, a soutenu l'accusation. Les défenseurs ont ensuite été entendus ; c'étaient : pour la veuve Decaux, Me Renaudeau ; pour Alexandre, Me Vauquier-Dutraversain ; pour la femme Alexandre, Me Boyvin-Champeaux; pour Ouallet, Me Manchon, et pour la femme Ouallet, Me Couvet. 
A l'audience du 24, à dix heures et demie du soir, le jury a rendu son verdict. La veuve Decaux et les époux Ouallet sont par lui déclarés non-coupables, mais sa réponse est affirmative en ce qui concerne les époux Alexandre. Toutefois le jury écarte la question de maison habitée, qui aurait entraîné la peine de mort, et il accorde à la femme Alexandre des circonstances atténuantes. 
Alexandre est condamné aux travaux forcés à perpétuité, et la Cour ordonne que, préalablement, il subira la peine de l'exposition sur la place publique de Gaillefontaine. La femme Alexandre est condamnée à vingt ans de travaux forcés sans exposition. Me Vauquier-Dutraversain demande acte à la Cour de ce qu'un individu, condamné à une peine infamante, a déposé comme témoin sans que le jury ait été averti de son état. Mais la Cour refuse cet acte, attendu 1° que le fait n'est pas justifié ; 2° qu’aucune observation n'a été faite par l'accusé au moment de la déposition du témoin.


Gazette des Tribunaux – Journal de jurisprudence et des débats judiciaires – 26/08/1844

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