Un arbre en Lozère ... et ailleurs

Armand del Fabre, le "cousin"

Le 13/05/2021 0

Dans Armand del Fabre

Armand Aigouy, de son nom de plume "Armand del Fabre", était le cousin germain de mon grand-père paternel. Je l'ai connu lorsque j'étais adolescente, il est décédé en 1986. A l'époque, je ne savais pas grand-chose sur lui, pour moi c'était "le Cousin", un religieux en retraite qui venait passer ses vacances dans sa maison familiale de la Volpilière, et nous abreuvait d'histoires en tout genre ... que je n'écoutais pas. Quelle erreur !

Sa biographie

Armand Louis Joseph Aigouy voit le jour le 30 décembre 1911 à la Volpilière, hameau de Saint-Pierre-des Tripiers, sur le Causse Méjean. Son père, Léon, "lo fabre" était forgeron. Sa mère, Léonie, était la sœur de mon arrière-grand-père. Très rapidement après sa naissance, ils s'installent à la Borie, sur la commune de Hures-la-Parade. La forge de Mr Recouly se vendait. Léon ne laisse pas s'envoler cette belle occasion, il l'achète. Armand passa donc son enfance à la Borie, avec sa sœur Marie-Thérèse Zélie (dite "la Cousine), née en 1913 et son petit frère, le "pauvre Emile" né en 1918. 

Armand entre au Juvénat en 1923, au Noviciat en 1927 et prononce ses engagements perpétuels en 1935. Il est ensuite nommé à Saint-Martin, à Naucelle, puis à Rocquefort. En 1932, il accomplit son service militaire. Il exerce ensuite à Sanvensa en 1933, au Sacré-Coeur à Rodez en 1935, à Saint-Sernin sur Rance comme directeur en 1938.

Mobilisé en 1939, il est fait prisonnier en 1940.

Après 5 ans de captivité en Allemagne, il rentre en France. En 1945, il revint à son premier poste à Naucelle, et en 1952 à l'école du Sacré-Cœur à Rodez comme professeur. Il était diacre de l'Ordre de Saint-Viateur, ordre enseignant.

Très présent dans la famille, ce cousin de mon grand-père participa grandement à "l'aide aux devoirs" de mes oncles et tantes. Amoureux du Causse Méjean, il ne manquait pas un été de séjourner dans sa maison familiale de la Volpilière, flore à la main, ni d'arpenter les chemins du Causse.

Le Cousin est décédé le 13 mars 1986, à Villefranche de Rouergue, à l'âge de 74 ans.

En sortant de captivité, il a écrit un certain nombre de nouvelles qui ont été publiées dans l'Amicale des Lozériens de Rodez. Certaines ont été reprises en patois sous le titre "Enfança caussenarda" dans la colleccion del Grelh Roergàs.

Ces histoires, pleines d'humour et de sensibilité, nous montre la vie sur le Causse Méjean dans la période de l'entre-deux guerres. Des bêtises d'enfants, la vie au quotidien, les loisirs (rares mais appréciés) mais également des évènements plus graves comme ses quelques souvenirs de la Grande Guerre.

Deux poèmes retrouvés

Nostalgie

Ô Lozère ! Terre de nos aïeux !
Gamin, je t’ai quitté pour d’autres cieux.
Je connus la « douceur » du pensionnat !
La longue, très longue vie d’internat.

Je ravalais une salive amère
Quand on m’insultait ! « Lozère, misère » !
Je rétorquais : « Aveyron, cochon » !
Et alors tombait une punition
Qui ravivait mon amour de gosse
Pour tout ce qui me restait au Causse

Aujourd’hui, je ne vois plus d’offense
Dans ces petites impertinences.
D’ailleurs j’ai connu un exil plus dur
Derrière les barbelés « impurs » !

Là, des hommes valaient de l’or, le poids !
Mon meilleur ami fut un Ruthénois !
Nous partagions tout : tabac et rations
Espoirs, chagrins et … humiliations !

Ce n’était plus le même diapason
Lorsqu’en rêve on retrouvait « sa » maison !
Libéré ! Adieu sol de misère
Vive notre terre hospitalière

Oui ! Vive notre belle Lozère
Où m’attendait ma petite mère.
Ta joie fut brève ma pauvre Maman !
De tes fils, il n’en revint qu’un : Armand.

 

Maman

En 90 ans quel chemin parcouru !
Que de vides, que d’êtres chers ont disparu !

A la veille de la guerre, père est mort,
Quatre enfants te restaient et t’aimaient bien fort.

La tourmente !... Ta maison démantelée.
Tes deux grands garçons connurent les barbelés.

Libéré, j’ai rejoint la Lozère
Où m’attendait ma petite mère.

Ta joie fut brève ma pauvre Maman,
De tes fils, un seul te revint : Armand.

Puis la mort frappa Séraphin,
T’enlevant notre benjamin.

Tu attendis plus de trente ans
Emile, ton lieutenant.

Après un très long calvaire
Tu l’as rejoint, près du Père.

Marie t’avait fermé les yeux.
N’était-ce pas un de tes vœux ?

Tu reposes sur le Méjean
Avec toutes nos bonnes gens.

Gisant à l’ombre de la Croix,
Veille sur nous, le jour décroit.

Attends-nous encore un moment.
A bientôt, au revoir Maman.

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