Cette chatte m’a rapporté deux superbes gifles, mais je ne les avais pas vraiment méritées.
Pendant le cours de grammaire, j’ai obtenu la « petite permission » et je suis allé arroser la muraille à côté. La chatte de la Zélie était un peu plus loin, elle surveillait quelque chose, quelque souris probablement ! La pierre que je lui jetai n’était pas trop mal ajustée et elle réussit à l’éviter, mais au lieu de se sauver rapidement, la voilà qui lançait nerveusement ses pattes dans l’herbe en faisant des bonds en arrière.
Intrigué par ce manège, je m’approchai doucement. Et c’est alors que je la vis, la vipère, qui lui faisait face et qui ne la quittait pas des yeux. Le reptile savait que son trou était proche et cherchait à s’y cacher. Et la chatte faisait tout pour l’empêcher. Chaque fois que la vipère rampait vers son trou, rac ! un coup de patte la tirait en arrière.
J’étais tellement occupé à observer ce spectacle que je n’entendis pas venir la maitresse. Par derrière, pif-paf, deux parenthèses inévitables me sont tombées sur les oreilles. Mais je restai planté là, et d’un geste silencieux, montrai la scène à la maitresse. Intéressée autant que moi, la maitresse voulut savoir comment cela finirait et m’obligea à rentrer vite fait à l’école.
Le dénouement fut rapide comme l’éclair. A peine la vipère eut enfilé sa tête dans le trou que la chatte, cric crac, d’un coup de dents, lui avait broyé les vertèbres du cou, et fièrement, la tête haute, trainait sa victime vers la maison.
On l’a raconté ensuite à la Zélie, qui nous dit que sa chatte avait un chaton et que ce n’était pas la première fois qu’elle lui faisait ce coup. Elle me donna un bonbon. Je ne l’avais pas vraiment mérité. Cela me consola un peu de la paire de claques que j’avais reçue.