A la sortie du village en descendant le Lavagnol, la pauvre mémé avait un petit jardin à côté d'un clapas, un amas de pierres du Causse. Sur ce clapas, nous trois, enfants désoeuvrés, nous nous étions perchés et avions trouvé une provision de munitions à portée de main ...
Et pourquoi faire ? J'ai honte de le raconter. Les pauvres salades de la mémé furent mitraillées et bombardées de haut, et un chargement de pierres s'accumula dans le petit jardin. Et le jeu aurait pu continuer encore longtemps, si la mémé, tout d'un coup, ne nous avait pas surpris.
Cela fit beaucoup de bruit et les parents arrivèrent en courant. On l'a senti passer. Ernestine, la mère de Paul, baissa la culotte de son rejeton et je vous promets qu'on se souvient de la brassée d'orties à laquelle il a eu droit par son père ce jour-là !
Quant à moi, il m'est tombé dessus quelques maitres coups sur la tête qui me dépoussiérèrent les oreilles, et puis direction la forge du père, et à genoux devant l'enclume. J'étais rouge de honte pendant qu'un client était là pour faire ferrer son cheval. Comme j'ai trouvé le temps long ! Le père, qu'on disait si rapide dans son travail, m'a paru bougrement lambiner ce jour-là.
Et le troisième larron ? Le Roger, lui, passa complètement au travers. La Mélanie l'a bien appelé, mais il ne s'est pas approché de chez lui avant la nuit.
Nous deux, après notre première punition, nous avons été fermement priés d'aller tout remettre en place dans le jardin de la Crostona. Et il a fallu que l'on retire toutes les pierres jetées. On n'aurait pas trouvé cela si dur si les trois coupables avaient été là. Mais il en manquait bien un... "C'est pas juste", grommelait Paul en se frottant les fesses ...